Mots-clés : genre – jeunes – médiation – patrimoine – réception – transmission
Le projet de communication porte sur les différentes formes de médiations destinées aux jeunes publics proposées par un ensemble de musées et monuments à l'échelle d'une région.
Il s'agit de mettre en relation le sexe des concepteurs de médiation, ce qu'ils proposent comme type de médiation, ce qu'ils utilisent comme médias et enfin comment les jeunes publics, filles et garçons, s'approprient ces outils et contenus conçus pour eux, selon un critère d'âge plus que de genre, alors même qu'ils comportent des marqueurs genrés.
La communication présenterait les résultats d'une recherche en cours dont l'ambition est de croiser les variables (sexe, âge, CSP), de combiner les types de sociologie (culture, médias, profession, publics, etc.) et surtout de prendre en compte la totalité de la chaine, de la production à la réception.
Le champ culturel interrogé est celui du patrimoine, circonscrit dans cette recherche aux musées et monuments. Ce champ renvoie plutôt à la culture légitime. Il n'en demeure pas moins très diversifié : une belle demeure bourgeoise, un château royal de la renaissance, une forteresse du moyen-âge, un FRAC, un muséum d'histoire naturelle et un musée de sciences intéressent-ils au même titre filles et garçons ? Les études des publics montrent que la fréquentation est genrée : les femmes sont plus présentes dans les musées d'art alors que les hommes privilégient les musées de sciences ou techniques (Coulangeon, 2009 ; Donnat, 2008 ; Mironner et al., 2001). Les connaissances en matière d'intériorisation des goûts genrés donnent à penser que les jeunes filles et garçons disposent déjà de systèmes structurés de préférences.
D'un autre côté les acteurs, les institutions, mais aussi les langages, les codes, les contenus se côtoient dans la conception comme dans la réception. Il résulte certainement de cette hybridation des registres des apprentissages moins solides, plus labiles (Lahire, 2004, 2014 ; Octobre, 2014). Est-ce vrai pour la construction des identités de genre et comment la sensibilisation au patrimoine y participerait-elle ? Quel rôle jouent les formes de médiations et les médias ? Peut-on observer des effets de renforcement et de combinaison dans l'apprentissage genré de codes et de connaissances sur le patrimoine ? L'objectif est d'explorer comment cette diversité de niveaux de sens est saisie et agencée pour recomposer un système de sens au niveau individuel, du côté des concepteurs comme des récepteurs.
Dans un premier temps nous nous intéresserons à « qui » conçoit les outils de médiation : hommes ou femmes, avec quelles formations, quelle origine sociale ? La fonction éducative fait-elle sens au point que l'on retrouve les femmes en masse dans les métiers de la médiation à l'instar des métiers de l'enseignement, parce que ces métiers « collent » aux représentations des compétences et du rôle de la femme ? Observe-t-on une répartition des médiateurs et des médiatrices différenciée en fonction du type de patrimoine ? Quelle est la « sensibilité » des médiateurs à la question des rapports sociaux de sexe, que ce soit au niveau de la différence d'accès des jeunes selon le sexe ou au niveau de leur contribution à la reproduction de stéréotypes de genre ?
Dans un second temps, nous croiserons le « qui » produit avec la manière de « faire » médiation. Les propositions sont-elles différenciées ? Ou bien la formation des médiateurs donne-t-elle des cadres suffisamment puissants pour orienter les productions ?
Le sexe de la médiation est d'abord étudié à travers l'articulation du « qui » et du « quoi » : qui produit quel type de médiation. Dès lors que la médiation utilise des « nouveaux outils », elle pose aussi la question du sexe des médias. Ceux-ci sont-ils vraiment neutres ? Changent-ils quelque chose à la construction d'un rapport genré à la culture ? Nous glisserons de la question du genre des médiations vers celle du genre des médias.
L'analyse des médiateurs / médiations / médias porte sur échantillon d'une trentaine de musées et monuments d'une même région.
Nous ciblerons dans un troisième temps la manière dont les petites filles et les petits garçons s'approprient ces médias et médiations. Ne viennent-ils pas tantôt renforcer, tantôt détourner, ou combiner la construction de modèles de genre ? La vision de ce que les jeunes et le numérique changent aux pratiques culturelles est bien documentée, mais est-ce qu'il en va de même avec le genre ? Peut-on constater une diversité des modèles de genre ? Une plus grande plasticité ?
Ce dernier moment qui porte sur la réception et la construction des identités genrées ne repose que sur deux institutions choisies volontairement assez opposées : l'une est emblématique du « grand château classique », l'autre d'un patrimoine contemporain, où les médiations sont voulues résolument innovantes et expérimentales. Les différences de production et de réception sont-elles si marquées ?